COMMENT CHOISIT-ON UNE NOUVELLE PIECE DE THEÂTRE ?

COMMENT CHOISIT-ON UNE NOUVELLE PIECE DE THEATRE ?

Nous sommes en pleine répétition des pièces de Molière que nous avons jouées au mois de Septembre 2013 au château de Couches (71) .

Nous savons que  nous  rejouerons ces deux pièces encore une ou deux fois ensuite

Gérard, le metteur en scène, nous dit :

- " Il faut penser à la nouvelle pièce de l’an prochain. Que voulez vous jouer ? "

Echanges de regards des membres de la troupe

Quelques-uns ont des idées…

On entend :

- " Et si on jouait Labiche ? la Cagnotte "

La Cagnotte est une comédie-vaudeville en cinq actes d'Eugène Labiche représentée pour la première fois à Paris au Théâtre du Palais Royal .

Résumé :

A La Ferté sous Jaourre, un groupe d'amis de longue date  jouent depuis un an à un jeu de cartes où ils accumule de l'argent. Pour profiter de cette somme un voyage à Paris s'organise . Léonida (sœur de Champbourcy, tante de Blanche) en profitera pour trouver un amant secret dont elle ne connaît pas l'identité . Très vite arrivés à Paris le lendemain, ils créent un malentendu dans un restaurant qui les conduira directement au commissariat, dont ils tenteront de s'évader .

- " Oui... c'est pas mal ! " 

Voilà les commentaires peu convaincants de la plupart des comédiens .

- " Et puis c'est chanté !!! "

C'est  vrai que très souvent cette pièce fut chantée...  et vu nos talents de chanteurs...

On oublie...

Rémi parle de Jules Renard … 

- " Jules renard, c’est intéressant ! "

- " Bien... mais quoi ?? »

On va chercher pour la semaine prochaine !

Un texte apparait très séduisant " Poil de carotte "

Poil de carotte est une longue nouvelle ou un roman autobiographique de Jules Renard publiée en 1894 qui raconte l'enfance et les déboires d'un garçon roux mal aimé .

Un téléfilm de Richard Bohringer a été créé  en 2003 . 

.

Résumé :

Poil de carotte est un enfant très mal aimé, qui, pour lutter contre les humiliations quotidiennes et la haine maternelle, n'a que la ruse, cette arme des faibles. Sans doute est-ce dans cette enfance malheureuse qu'il faut chercher les sources du scepticisme et de l'ironie de Jules Renard (1864-1910), son art de la litote, son style dense et précis, sa cruauté d'observation. Le récit se présente comme une suite de courts croquis formant des chapitres .

François Lepic, surnommé « Poil de carotte » à cause de ses cheveux roux et ses taches de rousseur, est montré comme victime des humiliations et de l'indifférence de ses parents, de son frère Félix et de sa sœur, Ernestine .

Il est lui-même bourreau, lorsqu'il massacre de petits animaux .

C’est subtil, fin, tendre .

Mais,

encore une fois, certains ne sont pas enthousiastes .

 Plusieurs comédiens disent :

- " Si on changeait  complètement de style, une pièce moderne, du genre… heu ! Policière ! "

Nous avons le texte des dix petits nègres d'Agatha Christie .

Chacun le lit pour la semaine suivante .

Les commentaires :

- " Pas mal..., mais pas très rigolo. "

L'ambiance de la pièce, les rôles aussi peut être, sont mal cernés .

Peu de comédiens sont intéressés .

 Gérard :

  - "  Haa... et la pièce que nous avons vue l’an passé à la comédie Française ? "

       Le fil à la patte de Feydeau

- " Oui, en plus, Rémi ferait un excellent Bouzin "

Gérard fouille aussitôt dans l’armoire. On doit avoir le texte quelque part .

Le voilà !

On se propose de lire chacun de son côté le texte, nous en reparlerons la semaine prochaine .

Un fil à la patte est une comédie en trois actes de Georges Feydeau créée le 9 janvier  1894 au Théâtre du Palais Royal .

 Le spectacle remporte un grand succès et garde l'affiche pendant 129 représentations .

résumé :

Comment se débarrasser d’une maîtresse lorsqu’on prévoit de se marier le jour même avec une riche héritière ? Voici ce à quoi s’emploie Bois d’Enghien, amant de Lucette Gautier, chanteuse de café-concert, artiste réclamée par la baronne Duverger pour la signature du contrat de mariage de sa fille avec… Bois d’Enghien lui-même. L’amant ménage Lucette et déjoue la cascade d’événements et de quiproquos qui pourraient dévoiler son projet .

Pour compléter le tableau : Bouzin, minable clerc de notaire et compositeur raté, le furieux général Irrigua, amoureux de Lucette prêt à tout pour conquérir la belle, et Viviane, la future mariée qui trouve son fiancé trop sage et rêverait d’un séducteur expérimenté, ainsi que quelques valets, rouages indispensables du vaudeville .

Un fil à la patte est une grande pièce, hallucinante, une réussite absolue ; elle met en scène des personnages ballottés par un système, entraînés par une histoire, un cadre . Ils sont dans un monde où l’argent a une place absolument déterminante ; et ils courent après, chacun à sa façon. L’argent préside à la destinée de chacun. Rien ne les arrête . Cela ne va pas sans une espèce de cynisme, de détachement par rapport à la vie sentimentale, à l’honnêteté des sentiments. C'est de là que viennent la férocité et la drôlerie de Feydeau .

Il y a un fond assez noir chez Feydeau... À la tendresse de Lucette répond la lucidité de Viviane : pour elle, la vie amoureuse, la vie sentimentale, n'est qu'un vaste marché où règne la loi de l’offre et de la demande .

 Beaucoup sont captivés:

- " Super, très amusant!

- "  Il faut jouer ça de façon très enlevée ".

 - " Je le sens bien " dit Gérard 

Mais...

Très vite  les difficultés apparaissent :

Très grand nombre de personnages. Nous ne serons que 10 à jouer l'an prochain .

Quoique certains membres de la troupe peuvent jouer plusieurs rôles … à condition de bien prévoir les entrées et sorties de scène et les changements de costumes .

 Beaucoup de costumes … plus de  vingt .

Déjà,  pour les "Molières", la couturière en a confectionné dix huit… c’est énorme !

Elle aura beaucoup, beaucoup de travail!

Nous gardons cette pièce en réserve, pour prendre le temps de réflexion .

Gérard émet un souhait :

- " Jouer une pièce de Roland Dubillard :

les Diablogues ".

Très drôle, absurde, juste ce qu’il faut pour un complet changement de style .

Nous les lisons individuellement pour la semaine suivante .

Puis nous faisons une lecture commune .

Certains rient beaucoup .

Tout le monde n’accroche pas. Mais ils se plieront à la majorité .

D’autres auteurs sont évoqués :

Tennessee Williams… un tramway nommé désir .

Peu d'engouement .

OBALDIA....

Réponse quasi unanime :

- " Ha oui!!! Mais il a écrit quoi au fait ?

Nous cherchons et trouvons un texte court :

Edouard et Agripine .

  Nous lisons, nous éclatons de rire,      texte très drôle, percutant, déjanté .

Seulement voilà, il est court .

Il faut absolument trouver une autre pièce pas trop longue pour compléter, afin de faire jouer tous les comédiens de la troupe, car celle-çi ne compte que trois personnages et surtout du même style . 

Tâche qui s'avère très difficile .

Une personne dit :

- " Haaaa, moi, j'ai entendu parlé de :

Du vent dans les branches de sassafras "

- " Je ne connais pas le sujet de la pièce

     mais... le titre sonne très bien! "

Bien on va chercher sur internet  .

La semaine suivante Gérard nous dit :

- "J'ai regardé  et je crois que ce n 'est pas mal... Un peu spécial mais comme nous voulons changer de style! C'est peut-être l'occasion . "

Nous achetons plusieurs textes et nous lisons en commun, chacun prend un rôle .

A chaque scène, les comédiens changent de personnage, pour apprécier celui ou celle qui sera le mieux dans  chaque rôle .

Tout le monde rit. Vraiment!

La semaine suivante, nous continuons la lecture et chacun désigne le personnage qui l'inspire le plus .

Le metteur en scène inscrit au tableau  tous les rôles et en face le nom du comédien qui souhaite interpréter ce personnage . 

Ensuite, nous faisons une deuxième colonne avec  le nom du comédien que les autres attribuent à chacun des personnages .

Nous continuons de lire .

Trois rôles possèdent deux noms, celui attribué par la troupe et celui qui correspond au souhait du comédien .

Bien sûr, une discussion très intéressante suit, chacun expose son point de vue, ses réticences, ses craintes, les difficultés dues au manque de souplesse pour certains, au manque de portée de voix pour d'autres, etc .

Et puis, entre gens intelligents nous trouvons un commun accord ; et les rôles sont définitivement inscrits au tableau .

Cette fois, nous tenons la prochaine pièce. Tout le monde est conquis, nous rions, nous imaginons déjà les attitudes pour certains, les costumes pour d'autres, les décors aussi enfin chacun y va de sa petite idée, de son délire même .

La pièce commence ainsi :

Nous sommes chez les ROCKELLER, colons misérables fixés dans le Kentucky .

La salle commune. Une grande table dressée sur des tréteaux .

Repas de midi. Nous sommes au début du XIX siècle .

Tom et Paméla soutenus par William, chantent en scandant le rythme à grands coups de fourchette sur la table :

- " quand un cowboy a faim,

    ce n'est pas pour demain,

     il lui faut tout de suite

    un boeuf dans sa marmite . "

John-Emery, tapant sur son assiette avec une grosse cuillère en bois et, d'une voix de pierre ponce .

- " Silence bande de Mormons, silence!..."

Il fait le signe de croix avec la cuillère en bois .

- " Seigneur, "

Tous se lèvent et se signent .

- " Seigneur, j'ai pas toujours été malpropre avec toi : je t'ai fait des tas d'enfants dont certains            avec ma femme, Caroline, qu'est bien honnête sous ce rapport là...

    Deux vivent encore sous mon toit : ma fille Paméla, qui présente pas mal d'avantages corporels, et      Tom, un sacré voyou qui t'honore aussi à sa façon..."

(A Tom:)

- " Ne tripote pas toujours ton révolver quand je fais la prière! "

Les rôles sont enfin parfaitement définis :

John-Emery Rockfeller, 70 ans un dur à cuire...

Rémi

 Caroline Rockfeller, 50 ans sa femme..

Françoise N.

 Paméla, coproduction de John -Emery et de Caroline, beauté provocante, sauvage, 17 ans...

Laetitia

 Tom, le fils, le frère, pâle voyou .

Xavier

 William Buttler, ivrogne, toubib .

Bernard

 Carlos, 40 ans, superbe, sorti spécialement d'un film de John Ford .

Gérard

 Miriam, dite "Petite coup sûr", putain au grand coeur .

Simone

 Oeil de perdrix, chef Apache, traître aux siens, du côté des Visages Pâles, gentil .

Et 

 Oeil de Linx, chef des Comanches, très, très mauvais .

Rodolphe

Françoise M.  Laurence    ne jouent pas, mais vont répéter des rôles pour être prêtes au cas où une comédienne ferait défaut et  pour réfléchir à d'autres styles d'interprétation. De plus, elles seront chargées du rôle indispensable de s'occuper des bruitages et des effets spéciaux, indispensables et très nombreux dans cette pièce .

Catherine, Gérard et Laétitia  mettront en scène .

Catherine fait des recherches sur le texte et nous explique les termes, les mots, la géographie des lieux où se déroulent l'action, en un mot elle nous fait une lecture expliquée .

De plus, elle nous aide à poser notre voix, à changer de voix, et avec l'aide de sa fille nous initie à interpréter les passages chantés .

Georgette continue dans la couture .

Alain, Michel, Ahmed, Robert  aidés par Julien  réaliseront et transporteront  les décors .

Anthony sera toujours aux maquillages et coiffures .

Anne-Marie ne joue pas cette année mais participera toujours aux spectacles en aidant un peu partout où le besoin se fera sentir .

Maintenant au travail !

Comments

[jeanjacques1957]

J'ai lu avec intérêt votre article, qui est bien documenté, sur le choix d'une nouvelle pièce. On comprend qu'il faut une unanimité dans le choix du texte pour que la troupe et les différentes personnes qui travaillent dans l'ombre puissent offrir un spectacle de qualité.

Je vous souhaite des répétitions fructueuses.

Jean-Jacques'22

Berne, le 15.10.15